Comment positionner le papier par rapport au marketing ?

L’Observatoire COM MEDIA s’intéresse régulièrement aux défis que doit relever le secteur industriel au sein de la filière de la communication et du marketing. En juillet dernier, un article abordait les défis que devaient relever les imprimeurs français1 face aux mutations du marché, le présent article pose avec  Frédéric Fabi, fondateur du groupe Dupli Print2, quelques bases de la réflexion que doivent mener les imprimeurs, professionnels du papier par excellence, afin de positionner ce support comme un élément incontournable des campagnes Marcom à l’heure du numérique.

Les clients ne veulent plus d’un simple imprimeur mais d’un véritable partenaire

L’important pour un imprimeur qui veut exercer son métier à une époque où les supports de communication marketing se multiplient, est d’apprendre à bien comprendre les besoins de ses clients mais aussi ceux des clients de ses clients c’est-à-dire le plus souvent les consommateurs et utilisateurs finaux. Il s’agit alors de bien saisir leurs attentes pour anticiper celles des clients directs de l’imprimeur. Une évolution qui a énormément changé la donne au cours des dix dernières années. Auparavant, l’imprimeur pouvait se contenter de ne se préoccuper que de ses propres clients et de fournir ce pour quoi ils payaient.

Par exemple, une entreprise appelait son prestataire pour imprimer une lettre mentionnant une information destinée à sa clientèle comme un changement d’adresse ou de conseiller. Elle demandait un devis à son imprimeur qui lui conseillait le meilleur support tout en programmant l’impression dans des délais raisonnables. La plupart des imprimeurs se contentaient de fournir des conseils d’ordre technique autour de la demande. Parallèlement, l’offre en matière de supports de communication était limitée.

Désormais, le consommateur final est sollicité quotidiennement sur une grande variété de supports de communication (papier, télé, réseaux sociaux, mails, sms etc…)  Si les professionnels du papier veulent que ce dernier puisse  conserver une chance d’être utilisée par les professionnels de la communication marketing, il faut supprimer ou justifier les contraintes fortes qui lui sont attachées aujourd’hui notamment les contraintes techniques de mise en œuvre (chaîne de création, impression, expédition) et celle du prix du timbre qui demeure difficile à contourner sauf par le biais d’économies d’échelle.

Le papier demeure pourtant un support largement plébiscité par les consommateurs car il est agréable à lire, à toucher et pratique à conserver.  Quant à une bonne campagne de communication, elle cherche à atteindre sa cible tout en étant réactive et adaptée. Comment est-il possible de relier l’un et l’autre ?

Le papier doit être un support comme les autres, y compris les dématérialisés

Un parcours client commence généralement par mail de bienvenue d’une marque à son nouveau client qui devra être incité et récompensé pour les informations qui lui seront demandées de renseigner. Un moment, elle se posera la question des supports à privilégier pour les suites de sa campagne de communication.

Aucun logiciel de marketing automation sans aucune exception à ce jour, n’est capable d’intégrer complètement le papier entraînant de fait une rupture de chaîne. Hors, le papier s’il veut être considéré comme un support pratique, efficace et économique viable à utiliser doit pouvoir être intégré complètement dans le parcours client.

La solution consiste alors pour le professionnel du papier d’être en capacité soit de se « pluger » à ces outils, soit de disposer d’une solution technologique alternative permettant de proposer du papier à la demande (print on demand). L’objectif consiste à proposer un support papier qui soit compétitif quelque que soit la quantité demandée et qui puisse être délivré en un temps très court intégrant la prise de commande, la réalisation du document, sa personnalisation, son impression jusqu’à sa mise sous pli.

Au final pour toute campagne de communication, le support papier doit servir à envoyer la bonne information au bon moment à la bonne personne. C’est donc en bénéficiant du même niveau d’automatisation que les autres médias que le papier aura sa chance.

Intégrer les métiers du papier au sein d’un panel plus large de métiers

Il est clair aujourd’hui que pour parvenir à ce niveau d’automatisation des processus prépresse, les imprimeurs doivent intégrer des métiers en lien avec le développement web mais aussi du conseil avec des chefs de projets capables de comprendre l’organisation des clients, leurs problématiques et comment y remédier. Le chef de projet doit aussi pouvoir réfléchir sur le contenu des documents des clients afin d’optimiser son ROI qui justifie les dépenses consenties. Cette nécessité de transformer un coût en profits quantifiables demande d’intégrer des compétences en matière de gestion des bases de données (analyse et reporting). Des compétences que les professionnels du papier devront savoir intégrer très rapidement afin d’être en mesure de compléter leur offre avec du marketing predictive, de l’analyse de données et du calcul de statistiques. La communication, a fortiori celle sur papier, est toujours trop cher pour un client qui ne peut calculer les bénéfices qu’il en retire.

L’imprimeur doit apprendre à compléter ses activités traditionnelles (création, impression, finition) par des profils compétents dans les domaines de l’informatique et du conseil dès à présent et se préparer à intégrer dans un proche avenir des profils maîtrisant les problématiques en rapport avec les bases de données.

Renforcer les équipes n’est pas chose facile notamment pour les métiers du web car les candidats sont moins nombreux que les offres de postes. Ils sont par conséquent très exigeants tant sur les conditions du poste que sur son contenu.

Côté impression à proprement parlé, le paradoxe est de voir des constructeurs de machines d’impression qui sortent des modèles de plus en plus grosses et rapides tandis que les volumes baissent. Cette tendance peut convenir à l’édition classique dont les tirages moyens, même s’ils passaient de 7000 aujourd’hui à 3000 en moyenne, resteraient viables avec les nouvelles technologies d’impression jet d’encre qui vont aller encore plus vite. Mais, il est légitime de se poser la question sur l’utilité de ces même machines pour les activités marketing qui reposent plutôt sur des petits volumes. Même s’ils sont concaténées au bout du compte, il faudrait privilégier des solutions laser feuille à feuille ou des jets d’encre feuille à feuille lorsqu’elles seront suffisamment au point pour satisfaire la demande.

De l’importance des bases de données pour quantifier l’impact papier

Beaucoup de grandes entreprises disposent de grosses bases de données très complètes mais parfois difficiles à utiliser pour des campagnes de Marcom. Face aux difficultés rencontrées par des services en interne, il pourra arriver à des professionnels de l’impression d’héberger des informations spécifiques à certaines opérations de leurs clients puis de recueillir les résultats des opérations de communication avant de les analyser. Tout l’enjeu des clients sera de casser leurs propres silos pour rendre leurs propres bases plus facilement exploitables. Les problématiques sont aussi bien d’ordre sécuritaire que réglementaire car elles entraînent une chaîne de responsabilités aux conséquences très fâcheuses en cas de manquement ou d’attaque.

Certains clients pourraient même être tentés de demander à leurs prestataires de fournir certaines bases pour déclencher une action imprévue ou inédite et pour laquelle ils n’ont aucune donnée viable.

De nouveaux marchés pour le papier en perspective

Au final, faciliter tout le processus de la communication marketing et la rendre plus abordable financièrement permet d’ouvrir ce marché à des nouveaux clients autres que les grands groupes comme les TPE, les groupements d’artisans ou les communautés de communes. Il serait alors possible pour les imprimeurs de proposer des prestations et d’offrir des services qui n’existaient pas auparavant en étant capable de fournir des solutions clé en main dont l’impression ne serait qu’un maillon.

1 http://obs-commedia.com/actu/le-defi-des-imprimeurs-francais-devenir-les-partenaires-de-leurs-clients/

2 En savoir plus sur Dupli Print : interview de Frédéric Fabi

About the Author

L’Observatoire COM MEDIA regroupe, depuis 2008, près de 300 acteurs de la filière de la communication (annonceurs, prestataires et institutionnels). L’association a matérialisé son positionnement autour des enjeux de la nouvelle économie de la communication. Les travaux réalisés portent sur le décloisonnement des métiers/secteurs, sur la structuration de la filière (constituée de 41 000 entreprises réparties en 19 secteurs d’activité) et sur l’accélération du business des entreprises par leur mise en relation entre les acteurs à travers des événements, des groupes de travail et des plateformes numériques.

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