RSE & Ethique au service du digital : les temps forts

Cette nouvelle conférence organisée par l’Observatoire COM MEDIA et dédiée à la RSE et à l’éthique au service du digital s’est tenue le 3 mars à l’auditorium du Groupe La  Poste. Des responsables RSE, des dirigeants de start-ups, des grands annonceurs ont manifesté leur intérêt pour un sujet de plus en plus prégnant dans la filière communication et marketing.

Cette fois encore, la conférence offrait aux participants la possibilité de poser leurs questions via la plateforme Beekast, adhérente à la plateforme OPEN’COM MEDIA. Les questions posées durant les tables rondes serviront à alimenter les articles qui seront publiés sur le blog  d’actualités de l’Observatoire COM MEDIA.

DOS

Dominique SCALIA, le président de l’Observatoire COM MEDIA, revenait pour débuter les débats sur l’intérêt croissant que manifestait la filière communication/marketing pour la RSE. Dès sa création, l’Observatoire COM MEDIA s’est appliqué à créer un groupe de travail consacré à ce sujet avec plusieurs de ses adhérents notamment le groupe La Poste. Force est de constater que les premières conférences dédiées aux problématiques de la RSE ne rassemblaient pas un auditoire nombreux mais qu’à force d’explications et d’efforts constants, elles ont été davantage perçues pour ce qu’elles sont, des éléments de réussite et d’efficacité pour les grands groupes mais aussi pour les entreprises de la filière communication/marketing.

LaurenceLaurence HULIN, directrice RSE et déontologue de la Branche numérique du groupe La Poste, rappelait l’implication de ce dernier dans les travaux initiés par l’Observatoire COM MEDIA et l’importance que revêtaient à ses yeux ces échanges entre professionnels en particulier sur les transformations induites par la nouvelle loi « Sapin 2 » sur les pratiques des entreprises de toutes tailles.

Bertrand BeaudichonBertrand BEAUDICHON, président et fondateur de MEDIAPLUS, était invité comme Grand Témoin de cette conférence afin qu’il apporte son éclairage d’acteur concerné et proactif de la filière communication et marketing. En guise de préambule, il précisait que si la loi Sapin à l’origine avait permis d’apporter d’avantage de transparence dans les relations entre agences et annonceurs, elle semblait dépassée par les nouvelles possibilités offertes aux campagnes de communication sur les différents supports numériques en permettant notamment des mises aux enchères d’espaces publicitaires considérées jusqu’à présent sans valeur réelle afin d’atteindre une cible au coup par coup. Le rajout de données de ciblage permet ainsi de donner une valeur différente entre l’entrée et la sortie à un inventaire publicitaire. Ce changement de paradigme exigeait que la loi Sapin soit mise à jour.

DÉONTOLOGIE, TRANSPARENCE & ÉTHIQUE / LOI SAPIN 2

Table ronde 1Laurence HULIN rappelait le contenu de la loi Sapin 2 dans les grandes lignes. Publiée le 10 décembre 2016 au JO, cette loi encadre l’obligation faite aux sociétés d’au moins 500 salariés ou appartenant à un groupe de sociétés dont la société mère à son siège social en France et dont le CA est supérieur à 100 millions, de prendre des mesures destinées à prévenir et détecter la commission en France ou à l’étranger, de faits de corruption ou de trafic d’influence. Cette loi engage la responsabilité des dirigeants et des personnes morales.

LaurèneLaurène BOUNAUD, déléguée générale de l’entité France de Transparency International, présentait son organisation qui lutte contre les pratiques de corruption et milite en faveur de la transparence dans le secteur privé aussi bien que dans la vie publique et ce à travers un réseau mondial rassemblant plus d’une centaine de chapitres. Transparency International publie un état des lieux de la corruption dans le secteur public qui place la France à la 23e place sur 176 pays dont 69% obtiennent une note inférieure à 50 sur 100. La situation demeure préoccupante avec une situation globale qui se dégrade. Les enjeux de la lutte contre la corruption sont essentiels car elle entraîne un coût financier important pour les économies (estimé entre 1 et 6% du PIB de l’Union européenne) et un déficit démocratique en véhiculant l’idée de l’impunité d’une classe privilégiée. La France, suite à des affaires relayées par les médias en 2013, connait un changement de culture par rapport aux pratiques de corruption et de malversations financières. Cette même année, la loi relative la transparence de la vie publique et les lois en 2014, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur et le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen, ont renforcé le cadre législatif. Ainsi, si les pratiques ont commencé à évoluer dans le bon sens, nous vivons une phase de transition paradoxale où les révélations plus nombreuses de la presse relayées par une justice plus efficace peuvent donner aux citoyens l’impression qu’il y a davantage de corruption. La France commence à rattraper son retard par rapport à ces proches voisins plus vertueux. Ainsi, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) créée en 2013 a transmis à la justice 25 dossiers en deux années d’existence qui ont été suivis pour certains par des condamnations à de la prison. La loi Sapin 2 complète cet arsenal et constitue une réforme importante qui corrige des dispositifs existants qui avaient montré leurs limites du fait de leur manque de cohérence. Cette loi renforce les moyens humains et financiers de lutte contre la corruption (création de l’Agence Française Anticorruption), met à disposition de  la justice de nouvelles procédures, complète les dispositifs protégeant les lanceurs d’alerte et renforce la transparence de certaines pratiques en particulier celles liées au lobbying. Trois piliers sont à respecter pour garantir la transparence des décisions des pouvoirs publics : la traçabilité des échanges, l’intégrité des échanges et l’équité d’accès aux décideurs publics entre les différents acteurs.

Léonidas KALOGEROPOULOS, vice-Président d’Ethic,  PDG et fondateur du cabinet Médiation & Arguments, soulignait l’importance que revêt le développement de la concurrence au sein des filières, notamment celles liées au digital,  qui ne compte actuellement que quelques acteurs dans la lutte contre certaines formes de corruption. L’attribution indue d’un avantage ou d’un marché n’est pas forcément le fait d’un versement d’argent mais peut être le résultat du simple monopole exercé par une entreprise qui se retrouve seule à proposer une prestation particulière. La question qui découle de cette situation consiste à se demander comment permettre l’arrivée de solutions alternatives sur le marché. Cette situation monopolistique est d’autant plus forte que les entreprises en position dominante sur leurs marchés, multiplient les campagnes de presse sur leur contribution au bien commun et à celui des consommateurs en particulier. Un autre regret exprimé par Léonidas KALOGEROPOULOS fut de constater l’extrême lenteur des législateurs qui sont obligés de suivre des procédures longues et complexes au cours desquelles interviennent les Léonidasdifférentes parties, notamment les avocats des entreprises visées qui continuent de profiter de leur position dominante. De plus, l’excès de transparence en matière de lobbying, notamment la tenue d’un registre, se retourne souvent contre les petites entreprises voire les parlementaires. Les premiers rechignent à entreprendre toute action de lobbying auprès des pouvoirs publics et contre des articles en faveur du monopole par crainte des sanctions du marché quant aux seconds, ils regrettent l’obligation qui leur est faite de rendre compte de leurs échanges notamment ceux censés lutter contre les situations de monopoles car les grands groupes disposent alors de moyens considérables pour s’opposer à toute velléité de changement. Penser que le pluralisme qu’il soit démocratique ou économique ne puisse reposer que sur la réglementation des différents secteurs et des institutions publiques, est un leurre. Il repose également sur le pluralisme des acteurs de chaque marché, chacun devant avoir assez de poids pour exprimer ses opinions et proposer ses solutions. On est en droit de craindre que l’effet pervers d’une transparence totale soit de « geler » toute tentative de déverrouiller ces monopoles.

Isabelle Fluxa

Isabelle FLUXA, correspondante à la protection des données au groupe La Poste, rappelait l’importance de sa fonction dans un contexte qui voit se développer plusieurs activités liées au numérique (hébergement des données, marketing direct, numérisation des documents et transformation numérique des différents services). Il est par conséquent primordial de s’assurer que la collecte des données respecte le cadre de la loi informatique et liberté. Son rôle ne se limite pas au respect de la loi mais consiste également à informer et sensibiliser toutes les personnes, qu’elles soient salariées ou prestataires, en charge, directement ou indirectement, des traitements des données personnelles aux obligations imposées par la législation. Enfin, elle assure le contact entre le groupe La Poste et la CNIL (Commission Nationale de l’informatique et des Libertés). Encas de manquement, cette dernière peut infliger une amende qui pourra se chiffrer avec la future réglementation européenne de protection des données jusqu’à 4% du chiffre d’affaires de la totalité d’un groupe même si l’entité incriminée est une de ses filiales. En devenant, DPO (Data Protection Officer), Isabelle FLUXA expliquait que sa fonction s’inscrivait dans un changement de philosophie sur la protection des données personnelles. Les responsables de traitement des données devront dès le départ mettre en œuvre leurs actions dans le respect total de la réglementation européenne (respect de consentement, de sécurité, droit à l’oubli et au déréférencement). Le DPO demeure dans son rôle de contact et de conseil mais il sera systématiquement le premier contacté pour tout contrôle opéré par la CNIL.

Marc DEBETS, CEO de Byo Group, qui se trouvait parmi l’auditoire intervenait pour rappeler l’importance que revêtait à ses yeux l’adoption fin février de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordres. Cette nouvelle réglementation fait suite à la prise de conscience des abus en matière de fournisseurs directs et indirects après l’effondrement du Rana Plaza en avril 2013 qui fit plus de 1 100 morts. Marc DebetsCette réglementation impose que tous les travailleurs de la supply chain d’une grande entreprise en France (5000 salariés en France ou 10 000 à l’étranger) voient leurs droits fondamentaux respectés notamment en matière de sécurité, de conditions de travail et de droit environnemental. Ces grands groupes ont entamé une cartographie des risques liés à leurs fournisseurs (pouvant en compter des milliers), doivent prendre des mesures concrètes afin d’être en conformité avec la loi et publier un rapport détaillant l’ensemble des actions menées. Il s’agit de percevoir les bénéfices de cette prise de conscience au-delà des coûts induits, pour en tirer une meilleure image de marque auprès des consommateurs mais aussi des jeunes talents à recruter qui sont davantage sensibles aux questions d’éthique. Cette notion de vigilance, loin d’être un handicap pour les entreprises françaises, doit être portée comme une plus-value à l’étranger comme fut portée jadis la notion de qualité contre celle du moins coûtant.

Laurence HULIN, complétait cette intervention en revenant sur la nécessité pour les PME et les TPE de s’engager sur la RSE qui constituera 10 à 15% de la note de la plupart des appels d’offre des grands groupes et des achats publiques.

Table ronde1Léonidas KALOGEROPOULOS, insistait sur la nécessité que l’engagement de la France soit reprise au niveau européen sous peine de voir les entreprises hexagonales être écartées des appels d’offre, pour avoir augmenté leurs prix après avoir sélectionné des sous-traitants rémunérant mieux leurs salariés. La conséquence immédiate serait alors de sanctionner les entreprises les plus éthiques et d’aboutir au résultat inverse que celui recherché. La réglementation ne peut pas tout, l’éthique doit être une affaire de responsabilité individuelle pour les dirigeants, leurs salariés et les consommateurs. L’intelligence collective des citoyens n’est pas assez sollicitée et la valorisation de l’éthique dans l’acte d’achat est le fruit d’un processus complexe mêlant la morale, l’éducation mais aussi les contraintes économiques.

Bertrand BEAUDICHON, concluait cette première table ronde en rappelant que dans la filière de la communication en France, les trois principales plateformes, toutes transnationales, captaient 70% des dépenses des annonceurs pour toucher les consommateurs. Il déplorait qu’en France, la tendance soit de trop réglementer un marché ouvert dont la valeur est essentiellement captée par des acteurs qui ne sont pas assujettis aux lois françaises. Au contraire, cette complexité réglementaire rend plus difficile l’émergence d’acteurs français et européens qui se font déposséder de leur contenu et de leur lectorat. Le risque à terme est d’aboutir à une situation où la moindre information sera obligatoirement filtrée par ces plateformes dominantes. L’information du public est un enjeu majeur pour la filière de la communication en France pour donner les moyens au public d’autoréguler un marché que ne peuvent plus contrôler les gouvernements. Seule la sanction des consommateurs peut faire bouger les lignes, encore faut-il qu’ils aient accès à des solutions concurrentes.

SÉANCE DE PITCHS

Alexandre SCALIA, responsable de la communication à l’Observatoire COM MEDIA, rappelait en guise de préambule que plus 130 entreprises innovantes avait trouvé sur la plateforme Innovation Open’COMMEDIA, un écosystème favorable à l’accomplissement de leurs ambitions. Il leur est possible désormais de promouvoir et de valoriser leurs innovations directement auprès d’un panel de grands donneurs d’ordres afin de créer plus facilement des liens favorables à une relation business durable dans un climat de confiance. Pour des acteurs de la filière communication/marketing qui est au cœur de l’environnement de l’Observatoire COM MEDIA, cette plateforme a déjà permis de nouer plusieurs collaborations concrètes entre des grands groupes et des start-ups.

Parmi ses adhérents, cinq start-ups qui placent la RSE dans leur business modèle disposaient chacune de trois minutes pour présenter leurs activités.

BEEBUZZINESS Présentation de Pierre Nicodème TASLE, PDG

BEEBUZZINESS développe depuis 2001 un écosystème éditorial au service de l’éco-édition et de la transformation digitale des entreprises. Ses innovations créent des passerelles durables entre les mondes physique et virtuel, sans opposer éco-responsabilité et ressources financières limitées. Elles couvrent aujourd’hui les marchés du production printing, du digital publishing, de la gestion documentaire, du digital signage et du big data. http://obs-commedia.com/plateforme-innovation/item/beevirtua/ 

NEWMANITY Présentation de Bérangère GUERRINI, Directrice communication

Réduction de l’empreinte écologique du web, respect de la confidentialité des données constituent l’ADN de la start-up. Pour un environnement de  travail plus agile et plus écoresponsable elle réinvente des solutions de messagerie collaborative. http://obs-commedia.com/plateforme-innovation/item/newmanity/

L’IMPRIMERIE SOLIDAIRE Présentée par Pascale JOLY, Directrice clientèle

L’imprimerie Solidaire se développe sur un marché concurrentiel, avec 2 sites de production. Elle est soumise aux mêmes contraintes de rentabilité et d’efficacité économique que toute autre entreprise. Tout en répondant aux exigences de ses clients en termes de qualité, d’optimisation des coûts et de réactivité. Sa mission est de favoriser l’intégration de travailleurs en situation d’handicap. Pour tous travaux réalisés, ses clients bénéficient d’une déduction fiscale de la taxe AGEFIPH ou FIPHFP http://obs-commedia.com/plateforme-innovation/item/limprimerie-solidaire/

CITIES-ZEN Présentée par Jean-François NAWANI, associé

Cette société a développé et commercialise auprès des acteurs territoriaux (mairies, départements, régions, Etat, ..) et des industriels de l’environnement, une plateforme numérique innovante d’écoute (réseaux sociaux, forums, blogs, …) et de dialogue entre collectivités et citoyens : Cities-Zen. Cities-Zen permet aux collectivités et aux élus de mieux piloter le « vivre ensemble » et l’action publique en se fondant sur une analyse objective et « temps réel » de l’expression citoyenne. http://obs-commedia.com/plateforme-innovation/item/cities-zen/

I WHEEL SHARE Présentée par Audrey SOVIGNET, Fondatrice

L’application qui donne une voix(e) aux personnes en situation de handicap. Ajoutez votre expérience en saisissant l’adresse du lieu visité ou en le géolocalisant sur la carte. Découvrez de nouveaux lieux, flânez au gré des expériences racontées par les autres. Témoignez de votre expérience positive ou négative sur place, partagez vos bons plans et découvertes. http://www.iwheelshare.com/

TRANSFORMATION NUMÉRIQUE – UTILISATION DES DATAS EN RESPECTANT L’ÉTHIQUE

Vincent DutotLes débats de la table ronde débutaient par un jeu avec l’assistance mené par Vincent DUTOT, enseignant-chercheur à la Paris School of Business. Faisant lever et assoir les auditeurs selon qu’ils utilisaient ou non quelques-uns des réseaux sociaux les plus connus, il illustrait la relative uniformité des comportements des internautes à travers le monde. A part de rares pays comme la Chine qui ont imposé leurs propres plateformes, on retrouve toujours les mêmes GAFAM en nombre d’utilisateurs et de taux de pénétration. Vincent DUTOT soulignait l’importance des flux sur Internet, soulignant qu’à travers le monde et durant sa dernière minute de présentation, des centaines de milliers de dollars venaient d’être générés par une seule plateforme d’achats en ligne, un million d’avis émis sur un réseau social,  plus de 500 000 photos partagées sur un autre réseau et 1400 courses réalisées par une plateforme de chauffeurs en ligne. L’utilisation de ces plateformes par des centaines de millions de consommateurs potentielles exige de la part des marques par conséquence qu’elles soignent leur e-réputation encore faut-il qu’elles maîtrisent les habitudes des internautes et connaissent les idées reçues afin de mieux cibler leurs campagnes de communication. S’il est  difficile de quantifier un ROI sur ces réseaux, il paraît plus évident de juger d’un « retour sur attention ». Le buzz qu’il soit mauvais ou bons est un moyen pour une marque de faire valoir ses qualités ou de réduire l’impact d’une information négative.

Au nombre des idées reçues, Vincent DUTOT soulignait celle qui voudrait que le digital soit l’apanage des jeunes générations ou qu’Internet soit déconnecté du réel et que ses utilisateurs ne fassent plus appel à des boutiques physiques par exemple. Enfin, il insistait sur la nécessité pour les marques de se lancer dans le digital en ayant une connaissance parfaite des habitudes des consommateurs et après avoir préparé un business modèle rigoureux. Ainsi, certaines plateformes connaissent un taux d’échecs de leurs projets de 80%. Si les plus gros acteurs peuvent se permettre de lancer des dizaines de projets car il suffit d’un ou deux pour rentabiliser l’ensemble des investissements, il n’en est pas de même pour les petites structures innovantes. Une entreprise doit accepter et intégrer les nouveaux enjeux induits par la transformation numérique qui lui permettront de coller aux besoins des consommateurs.  Elle doit aborder sa transformation numérique par étapes plutôt qu’au moyen d’une approche radicale et repenser son organisation, réfléchir à ses outils en veillant à impliquer son personnel afin d’adapter ses services et ses produits dans l’environnement numérique dans lequel elle va communiquer. A ce stade, il est important que cette entreprise ne cherche pas à tout faire, chaque support a sa raison d’être et rassemble un public spécifique (âge, sexe, catégorie socio-professionnelle, etc…). La transformation numérique exige de la souplesse (savoir changer de support, de méthode, de technologie), de la réactivité (répondre rapidement aux avis, négatifs ou positifs, de ses utilisateurs) et d’apprendre continuellement (la technologie est un support, pas une finalité).

Table ronde2Véronique TORNER, membre et administratrice au Conseil National du Numérique, expliquait les missions du CNNum qui s’adresse au gouvernement, aux parlementaires, aux organisations professionnelles, et à tous types d’administration et ses missions sont d’éclairer ces acteurs sur l’impact du numérique sur l’économie et la société. Ses avis et recommandations sont rendus publics et depuis plusieurs années, dans une démarche collaborative avec les citoyens et tous les acteurs privés et publics. Le CNNum s’est positionné notamment sur la neutralité du net, sur la santé, l’éducation avec la transformation numérique de la recherche et celle des PME. Les membres du conseil réfléchissent sur plusieurs sujets à la demande de différents acteurs ou à leur initiative. C’est ainsi que le CCNum s’est emparé des questions sur le fichier TES (Titres Electroniques sécurisées). Le 30 octobre 2016, le gouvernement publiait le décret n°2016-1460 prévoyant l’instauration d’un nouveau fichier des “titres électroniques sécurisés” (TES) à l’ampleur inégalée. Ce fichier doit rassembler à terme les données d’état-civil et les données biométriques de l’ensemble des citoyens français, et fusionnera les données existantes liées aux passeports (15 millions d’individus) et aux cartes d’identité (environ 10 millions). La vocation de ce projet de fusion est de lutter contre la fraude et de simplifier la gestion de cette énorme base de données. Si le CCNum ne voit rien à redire sur les intentions premières de ce projet, il se pose des questions sur la procédure choisie par le gouvernement (décret plutôt que débat parlementaire) et sur les technologies employées notamment celles qui assurent la sécurité des données de 60 millions de citoyens qui dépend fortement du choix de l’architecture. Un autre sujet est plus philosophique avec la possibilité de dévoyer le système qui ne serait plus utilisé comme moyen d’authentification mais d’identification. Le CCNum n’a pas débattu sur une éventuelle volonté de dévoyer le système mais sur la possibilité technique de le faire. Finalement, ce travail des membres du conseil a consisté à alerter le gouvernement sur ces problématiques du fait qu’il ne maîtrise pas toutes les conséquences de la numérisation, le fichier TES étant symbolique sur ce point. Ces questions de sécurité posent également la problématique de la maîtrise de bases de données par des acteurs privés transnationaux et par conséquent celle de la souveraineté des pays. La question finale est de savoir où placer le curseur entre sécurité et liberté, transparence et pudeur. Le CCNum continue d’émettre des recommandations sur les plateformes et d’assurer une première base de notation sur leurs pratiques et leur respect des règles de déontologie par les plateformes afin d’informer les citoyens et leur permettre de choisir un support en connaissance de cause.

Bertrand BEAUDICHON en sa qualité de grand témoin souhaitait revenir sur le bon sens des consommateurs mais sur l’absence de moyens dont ils disposaient pour « sanctionner » les plateformes peu vertueuses. Ces plateformes doivent se voir obligées de sanctuariser le service public qu’elles rendent, c’est-à-dire éviter le tout payant, sous peine d’être abandonnées par leurs utilisateurs. Enfin, ces derniers doivent être davantage renseignés sur l’argent que ces plateformes génèrent sur l’utilisation de leur identité numérique.

Muriel BarneoudMuriel BARNEOUD,  directrice de l’engagement sociétal du groupe La Poste, souhaitait rapporter l’expérience du groupe La Poste qui mise sur les individus afin qu’ils puissent maîtriser et gérer leur « double numérique ».  La révolution industrielle n’était pas seulement d’ordre technique, elle avait également posé les jalons d’une véritable reconnaissance des droits physiques de l’individu. A l’ère numérique, il reste à définir et garantir les droits du double numérique de chacun d’entre nous. La Poste souhaite mettre en place la même politique qu’elle a mis en place depuis sa création à savoir la stricte confidentialité des courriers qu’elle achemine. Cette déontologie du courrier physique, la Poste veut l’appliquer aussi au numérique. Un autre enjeu relevé par la Poste est de convaincre ses utilisateurs que cette confidentialité à un coût et que les plateformes gratuites ne le sont pas vraiment car elles se rémunèrent sur l’utilisation des données qui leurs sont confiées transformant  leurs utilisateurs en simples objets marchands. La Poste a souhaité proposer avec sa plateforme Digiposte, un coffre numérique dans lequel l’utilisateur peut stocker ses documents confidentiels. Cette plateforme propose également un service de collecte de données et une assistance pour formaliser des dossiers à destination de tiers grâce aux données stockées dans le coffre avant de les placer dans un espace dédié et sécurisé pour une période définie à l’avance. La Poste repose son action numérique notamment sur sa culture d’entreprise notamment la prestation de serment des postiers qui assure à ses utilisateurs un environnement respectueux de la confidentialité de ses informations.

David GodestDavid GODEST, CEO de Dolmen, commençait par rappeler que le e-commerce représente en moyenne 5% de la valeur du commerce dans les pays occidentaux contre 10 % pour la vente par correspondance dans les années soixante-dix. Plus de vingt ans après l’apparition d’Internet et des sites marchands, la part de la vente à distance est moindre qu’il y a quarante ans. Dans le monde physique, la « vraie vie », des magasins jusqu’ici présents seulement dans les grands centres villes se sont adaptés et se sont installés dans des villes de plus petite taille. Cette vision d’un monde où prédomine l’achat physique et les échanges entre individus n’est-elle pas préférable à celle d’un monde hyper-connecté où nous resterions seuls chez nous devant un écran à commander des produits sélectionnés voire imposés par quelques fournisseurs ? Dolmen essaye de réconcilier le monde du digital et le monde physique en permettant par exemple à l’artisan du coin de connaître sa clientèle aussi bien que les géants du net. Cette plateforme permet aux magasins et commerces physiques de capter des informations sur leurs clients de manière transparente, honnête et responsable. Les clients volontaires se voient interrogés sur les produits qu’ils achètent et se voient proposer des offres correspondant à leurs préférences, s’ils souhaitent se désabonner à la plateforme, ils peuvent le faire immédiatement et définitivement. Cette solution fonctionne et s’est développée en France et dans plusieurs pays européens. Dans un monde globalisé, les consommateurs s’intéressent de plus en plus aux produits locaux et fabriqués près de chez eux.

FOCUS SUR LA NORME ISO 20400 – ACHATS RESPONSABLES

Table ronde 3Françoise ODOLANT, responsable du pôle acheteurs, chartes et labels au Médiateur des entreprises, intervenait pour présenter la nouvelle norme ISO 20400 – achats responsables. Cette initiative française a rassemblé 37 pays des cinq continents qui ont permis de lancer ces travaux présidés par la France reconnaissant ainsi son leadership dans les domaines des achats responsables. Cette norme, éditée le 15 avril 2017 en anglais et vraisemblablement en français également, est notamment le résultat de la volonté portée par la France de voir s’imposer sa vision responsable des relations avec les fournisseurs plutôt que celle du laisser-faire. Cette norme ISO 20400 décrit en une cinquantaine de pages les processus d’achat en partant des fondamentaux sur les achats responsables. Un chapitre est consacré aux méthodes pour coordonner les directions achats stratégie, RSE et générale d’une organisation. La norme aborde également l’organisation même d’une direction dédiée aux achats. La norme donne le sens en amont mais aussi au professionnel des achats qui se voient aider dans ce document avec notamment de nombreux outils en annexe.

En France, nous avons déjà la méthode pour évaluer les entreprises par rapport à cette norme. Nous perfectionnons cette méthodologie afin qu’elle puisse s’étendre aux TPE et PME ainsi trois d’entre elles, toutes adhérentes à l’Observatoire COM MEDIA, se sont prêtées à cette exercice.

Bertrand BEAUDICHON concluait la conférence en soulignant que les problématiques soulevées par la RSE étaient très proches de celles de l’ensemble de la filière de la communication. Les problèmes posées, notamment par la souveraineté des données, ne trouvera pas une réponse seulement en France et uniquement par des lois ou des normes, mais par une prise de conscience commune des entreprises et des consommateurs, tous citoyens, qu’il leur faut prendre leur destin en main.

About the Author

L’Observatoire COM MEDIA regroupe, depuis 2008, près de 300 acteurs de la filière de la communication (annonceurs, prestataires et institutionnels). L’association a matérialisé son positionnement autour des enjeux de la nouvelle économie de la communication. Les travaux réalisés portent sur le décloisonnement des métiers/secteurs, sur la structuration de la filière (constituée de 41 000 entreprises réparties en 19 secteurs d’activité) et sur l’accélération du business des entreprises par leur mise en relation entre les acteurs à travers des événements, des groupes de travail et des plateformes numériques.

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