La réussite à la française, innover face aux GAFAM…

La filière de la communication en France n’échappe pas aux transformations radicales induites par le numérique et de nombreux acteurs de toutes tailles mettent en place des solutions capables de leur assurer un développement pérenne dans un contexte économique en perpétuelle transformation. Face aux GAFAM, ces entreprises innovantes doivent apporter une véritable plus-value, s’assurer une certaine autonomie tout en cherchant à se financer et s’intégrer à l’image – souvent excellente – du savoir-faire français véhiculée en Europe et au-delà.

La  France est perçue comme l’un des pays les plus innovants au monde. Elle est placée 3e dans les principaux classements de plusieurs études reconnues. Notre pays dispose de nombreux atouts et d’un environnement favorable aux entrepreneurs en matière d’innovation : des ingénieurs de très bon niveau, un réseau proactif à travers le monde et cette « french touch » qui allie performance, rigueur et élégance. Cependant, force est de constater qu’il est plus difficile pour les entreprises innovantes en France qu’outre-Atlantique d’atteindre la taille nécessaire pour peser sur le marché au niveau mondial.

Nombre de jeunes entrepreneurs français sont motivés par l’ambition d’apporter de nouvelles solutions  dans un environnement perpétuellement en évolution. Les GAFAM paraissent comme être les références absolues et la tentation est grande de se positionner en miroir face à ces dernières. Pourtant, ces géants, déjà acteurs historiques du numérique, paraissent avoir atteint une hégémonie si absolue qu’il pourrait sembler vain de vouloir se hisser sur leurs épaules et les remplacer. Il existe cependant une multitude d’entreprises innovantes, ambitieuses et dynamiques, qui peuvent briller et se démarquer grâce à des solutions toujours plus disruptives et populaires, notamment sur les réseaux sociaux. De leurs expériences, il est impossible d’en tirer des recettes toutes prêtes mais quelques règles de bon sens.

Se démarquer de la concurrence, affirmer sa plus-value pour le client final…

Il est inutile de vouloir faire comme les GAFAM d’autant qu’ils ne forment pas un bloc homogène et se concurrencent dans plusieurs secteurs en laissant beaucoup d’autres libres d’être investis pour un temps. L’innovation est d’abord dans l’usage qu’en font les utilisateurs et c’est à leur sens pratique qu’une entreprise doit faire appel. En matière de fidélité, l’internaute est en général prompt à changer ses habitudes, s’il est convaincu par une solution plus efficace et facile d’utilisation. Au-delà de la seule technologie, la valeur ajoutée d’une entreprise peut être dans sa philosophie notamment vis-à-vis du respect de la vie privée ou dans sa capacité à offrir des services de proximité. Il existe également des niches, comme l’œnologie, qui génèrent des leads de clients exigeants et à fort pouvoir d’achat en quête d’offres commerciales inédites, adaptées et de qualité. Trop de start-ups se contentent encore de simplement décrire leur solution plutôt que de se concentrer sur les avantages qu’elles procurent. La France est un pays de concepteurs et d’ingénieurs, aussi nombre de nos entrepreneurs se concentrent sur la performance technique de leurs solutions sans y apporter un positionnement fort. Les GAFAM, imbibés de cette philosophie de conquête propre au « nouveau-monde », portent des ambitions qui dépassent leurs seules offres de service et les propulsent toujours plus haut.

Assurer un financement équilibré et adapté aux différentes phases de croissance de l’entreprise

La croissance passe par un financement efficace et adapté à chacune de ses phases de croissance. Une recherche de financement réussie passe par le maillage d’investisseurs privés et publics et la multiplication des dispositifs à solliciter. Côté public, il existe de nombreux programmes de financement au niveau de l’Etat, des régions, des départements voire des communes. Côté privé, les fonds de capital-risque et autres business angels se multiplient en France et gagnent en capacités d’investissement. En 2016, en France, le nombre de levées de fonds a approché les 600 dépassant celui du Royaume-Uni qui se situe légèrement au-dessus de 500. De même, les grands groupes français augmentent leurs investissements dans des fonds d’investissement interne (corporate venture) même si leur montant demeure 24 fois plus élevés aux USA qu’en France en 2015 (6,9 Mds € vs 0,3 Mds €). Si les montants disponibles outre-Atlantique, y sont bien plus élevés qu’en France, la demande est proportionnellement plus grande que l’offre dans un environnement impitoyable. L’échec est mieux accepté en Amérique que sur le vieux continent mais pour survivre il faut adopter une ambition commerciale affirmée et agressive à laquelle nous sommes peu habitués en France. De plus, les géants que sont les GAFAM peuvent se permettre d’investir dans des dizaines de projets dont un ou deux seulement rapporteront un retour sur investissement. Un entrepreneur français n’a pas ce luxe et il ne doit pas hésiter à faire appel à l’ensemble des possibilités qui lui sont offertes par les acteurs publics et privés pour réaliser un projet bien préparé.

L’innovation et la marque « France », une valeur partagée dans l’Hexagone, des TPE aux plus grands groupes

Les partenariats des PME innovantes avec des grands groupes peuvent revêtir bien des aspects allant de la simple relation donneur d’ordres/fournisseur à la pleine intégration. Les entreprises innovantes françaises bénéficient désormais d’une attention toute particulière des grands groupes qui accélèrent la mise en place en leur sein de structures dédiées à ces collaborations nécessitant davantage de souplesse et de rapidité dans les décisions. Il existe une forte appétence dans ces groupes pour les solutions novatrices et une envie de porter une certaine « excellence française » à l’international. En parallèle, l’image des PME innovantes françaises à l’étranger, notamment via leur forte présence durant les meetings internationaux comme au CES, marque les esprits. Les GAFAM ont acquis une telle notoriété qu’ils n’ont besoin de personne pour véhiculeur leur image auprès des consommateurs. Plus puissants et plus riches que nombres de pays, ils sont en capacité de développer leur doctrine en reposant sur leurs seules ressources. Une jeune entreprises française est « invisible » et doit par conséquent adosser ses propres compétences à des plus grands ensembles comme la French Tech. Cet écosystème est aussi plus « protecteur » et permet à une start-up en France de garder une grande part d’autonomie tandis que les GAFAM investissent leurs énormes profits dans le rachat massif de jeunes pousses afin de s’approprier leurs solutions, ces dernières se retrouvent en conséquence complètement absorbées et disparaissent.

Une spécificité française au service de la souveraineté numérique européenne

Les Etats-Unis représentaient fin 2014, 80% de la capitalisation boursière des entreprises numériques, contre 2% en Europe. Cette domination matérialise la volonté de cette superpuissance de maîtriser le net afin d’assoir sa suprématie. Accompagnant cette stratégie, les GAFAM sont les vecteurs d’une culture américaine voire californienne, de comportement, d’esprit, de liberté, de vision du monde. Face à leur situation considérée comme hégémonique, la Commission Européenne a décidé de durcir drastiquement ses règles liées à la protection des données personnelles, les grands groupes du Net vont devoir respecter un cadre législatif unifié… et plus strict. Les autorités américaines ont fait part ouvertement de leur désapprobation suite à ces nouvelles dispositions. Les opinions publiques, de mieux en mieux informées sur l’utilisation qui est faite des données qu’elles partagent, volontairement ou non, sont davantage sensibles aux arguments des entreprises qui leur fournissent des réponses concrètes en matière de respect de la vie privée. Pour les pays membres de l’Union européenne, il est désormais crucial de se doter d’entreprises capables d’assurer leur souveraineté numérique. Les problématiques liées à la sécurité des données et des personnes, les nécessités de la compétition économique ou simplement le souci de conserver une diversité des offres aux consommateurs sont autant d’enjeux dont doivent s’emparer les entreprises françaises. Cette spécificité joue à ce titre un rôle majeur dans la protection des intérêts économiques de la France en particulier mais aussi de l’Europe à plus grande échelle. C’est une carte dont doivent s’emparer les entrepreneurs français pour se différencier en cherchant à associer éthique et efficacité.

Il n’est ni sain, ni efficace pour une jeune entreprise française de ne se positionner simplement qu’en porte-à-faux des GAFAM. Il lui faut cependant analyser les clés de leur réussite et proposer une offre de service qui soit ambitieuse et surtout pragmatique afin de convaincre les utilisateurs. Nous bénéficions en Europe, d’une culture d’entreprise propre qui peut se nourrir des réussites des géants du Net mais qui portent également des valeurs bien différentes. La réussite à la française deviendra une réalité en permettant à nos entrepreneurs de continuer à porter cette excellence opérationnelle reconnue à travers le monde tout en portant une stratégie commerciale sans complexe vis-à-vis des géants du net.

About the Author

L’Observatoire COM MEDIA regroupe, depuis 2008, près de 300 acteurs de la filière de la communication (annonceurs, prestataires et institutionnels). L’association a matérialisé son positionnement autour des enjeux de la nouvelle économie de la communication. Les travaux réalisés portent sur le décloisonnement des métiers/secteurs, sur la structuration de la filière (constituée de 41 000 entreprises réparties en 19 secteurs d’activité) et sur l’accélération du business des entreprises par leur mise en relation entre les acteurs à travers des événements, des groupes de travail et des plateformes numériques.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.